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URGENCE PROCHE ORIENT

 Exigez avec nous la justice pour toutes les victimes et la protection sans condition des populations civiles

©Amnesty International /Hannibal Hanschke

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Allemagne

Chaque année, nous publions notre Rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Un an d’enquête, 150 pays analysés. Voici ce qu’il faut savoir sur les droits humains en Allemagne en 2024.

Les autorités allemandes ont expulsé 28 personnes vers l’Afghanistan, en violation du principe de « non-refoulement ». Cette année encore, des cas de recours excessif à la force de la part de la police lors de manifestations pacifiques organisées par des militant·e·s pour le climat et des personnes soutenant les droits des Palestinien·ne·s ont été signalés. Les expressions de solidarité avec le peuple palestinien ont continué d’être réprimées. Des mesures législatives adoptées en octobre ont excessivement restreint les aides accordées aux personnes demandeuses d’asile et étendu la surveillance biométrique et les contrôles de police sans exigence de suspicion raisonnable, augmentant le risque de profilage racial.

DISCRIMINATION

En janvier, des journalistes ont révélé un plan raciste d’expulsions massives, qualifié de « remigration », élaboré par des sympathisant·e·s d’extrême droite, dont des personnalités politiques et du monde des affaires.

En mars, l’Allemagne a nommé son tout premier commissaire de la police fédérale, chargé de traiter les plaintes pour discrimination et pour d’autres violations visant des membres des forces de police fédérales. Cependant, l’absence de mécanisme de plainte indépendant et opérant et le fait que les policiers et policières ne soient pas obligés de porter un badge d’identification, tant au niveau fédéral que dans les différents États (Länder), continuaient de mettre à mal l’efficacité des enquêtes.

La rhétorique raciste et anti-migrant·e·s est restée d’actualité tout au long de l’année, surtout après les attaques au couteau survenues dans les villes de Mannheim et Solingen en mai et août, dont l’une aurait été perpétrée par un Afghan et l’autre par un Syrien.

Ces discours préjudiciables ont influé sur la législation. En octobre, le Parlement a adopté un nouveau « paquet sécurité » comprenant des dispositions faisant l’amalgame entre la criminalité et l’origine ethnique, la nationalité et des considérations ancrées dans le racisme. Ce train de mesures a restreint excessivement les aides accordées aux personnes demandeuses d’asile et étendu la surveillance biométrique et les contrôles de police sans exigence de suspicion raisonnable, ce qui augmentait le risque de profilage racial.

Des informations faisant état d’une hausse des crimes de haine antisémites, islamophobes ou racistes et de ceux visant des personnes LGBTI ou d’autres minorités suscitaient de vives inquiétudes.

Droits des personnes LGBTI

En avril, le Parlement a adopté une loi sur l’autodétermination permettant aux personnes transgenres, non binaires et intersexes d’obtenir la reconnaissance juridique de leur genre par simple déclaration auprès d’un bureau de l’état civil. Entrée en vigueur en novembre, cette nouvelle loi a remplacé la Loi de 1980 sur les personnes transsexuelles, qui imposait aux personnes transgenres qui souhaitaient obtenir la reconnaissance de leur genre à l’état civil de se soumettre à des évaluations psychologiques discriminatoires et à une procédure judiciaire.

Malgré l’avancée que représentait ce texte, des organisations de défense des droits humains ont déploré qu’il ait été influencé par des discours hostiles aux personnes transgenres (une disposition autorisait par exemple les sociétés privées à leur refuser l’accès à des lieux non mixtes) et qu’il ne s’attache pas suffisamment à protéger les personnes transgenres, non binaires et intersexes.

Violences fondées sur le genre

En novembre, l’Office fédéral de la police judiciaire a signalé une augmentation des infractions liées au genre perpétrées contre des femmes en 2023. La hausse concernait les crimes de haine misogynes (+56,3 %), la violence en ligne (+25,0 %), la traite des êtres humains (+6,9 %), la violence sexuelle (+6,2 %) et la violence domestique (+5,6 %) ; le nombre de femmes tuées par leur partenaire ou ex-partenaire a augmenté de 16,5 % par rapport à l’année précédente.

LIBERTÉ DE RÉUNION PACIFIQUE

Le 21 mai, le parquet de Neuruppin a engagé des poursuites au titre de l’article 129 du Code pénal contre cinq membres du groupe militant pour le climat Dernière génération, les accusant de « formation d’une organisation criminelle ». Cette procédure renforçait la répression pénale contre le mouvement pour le climat.

Tout au long de l’année, des informations ont fait état de cas de recours excessif à la force dans les opérations de maintien de l’ordre (notamment avec l’utilisation de techniques de contrainte physique douloureuses) lors de manifestations pacifiques organisées par des militant·e·s pour le climat et des personnes défendant les droits des Palestinien·ne·s. En septembre, lors d’une manifestation pacifique en soutien au peuple palestinien, un jeune homme a perdu connaissance après avoir été frappé par la police. Des organisations de la société civile ont exprimé leur préoccupation concernant le rôle que jouait le racisme, notamment anti-arabe et anti-palestinien, dans la réponse des autorités aux manifestations de soutien aux Palestinien·ne·s.

Le 12 avril, la police de Berlin a interdit un « congrès sur la Palestine », puis l’a dispersé alors qu’il venait de commencer. Plusieurs personnes invitées à intervenir lors de cet événement ont été empêchées d’entrer dans le pays ou de participer à des activités publiques.

Le 26 avril, dans le quartier gouvernemental de Berlin, la police a interdit un campement de protestation contre les transferts d’armes vers Israël en invoquant un « danger pour la sécurité publique » sans motivation suffisante. Elle aurait ensuite eu recours à une force excessive pour disperser les participant·e·s.

LIBERTÉ D'EXPRESSION

Les autorités ont continué de tenter d’ériger en infraction pénale l’utilisation du slogan « Du fleuve jusqu’à la mer », interdit en 2023 parce qu’il était considéré comme « un symbole du Hamas ». En juin, un tribunal cantonal de Berlin a déclaré une militante coupable au titre de l’article 140 du Code pénal pour avoir utilisé ce slogan lors d’une manifestation en octobre 2023. En novembre, le tribunal régional de Berlin a déclaré une femme coupable « d’usage de signes associés à une organisation terroriste » au titre de l’article 86 du Code pénal pour avoir relayé ce slogan sur les réseaux sociaux.

En mai, le ministère fédéral de l’Éducation et de la Recherche a lancé une évaluation interne afin de déterminer si des universitaires pouvaient se voir refuser des financements publics pour s’être opposés ouvertement à l’expulsion d’étudiant·e·s qui manifestaient en signe de solidarité avec le peuple palestinien à l’Université libre de Berlin.

Le 7 novembre, le Parlement a adopté une résolution indiquant que la définition opérationnelle de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) devait être utilisée dans la rédaction des lois pour remédier à toute insuffisance perçue dans la lutte contre l’antisémitisme. L’objectif était que cette définition constitue une référence pour la révision de diverses dispositions législatives, notamment du droit pénal et relatif à l’asile, et pour déterminer l’allocation des fonds publics.

Des organisations de la société civile et des juristes de renom ont estimé que la définition de l’IHRA était incompatible avec les normes internationales concernant la liberté d’expression. La résolution du Parlement a donc créé un flou juridique et suscité des craintes d’atteinte à la liberté d’expression, à la liberté académique et à la liberté artistique.

DROITS DES PERSONNES RÉFUGIÉES OU MIGRANTES

En janvier, le Parlement a adopté la Loi sur l’amélioration du rapatriement, qui a étendu les pouvoirs des autorités en matière d’entrée dans certains lieux, de perquisition et de détention, et augmenté le risque de détention illégale pour les personnes demandeuses d’asile en Allemagne.

Le gouvernement a annoncé en juin son intention de reprendre les expulsions vers l’Afghanistan et la Syrie. En août, l’Allemagne a renvoyé 28 personnes en Afghanistan, en violation du principe de « non-refoulement ».

Des contrôles de police aux frontières intérieures de l’espace Schengen ont été appliqués à partir du 16 septembre sans exigence de suspicion raisonnable d’infraction, ce qui augmentait le risque de profilage racial, de privation de l’accès à la procédure d’asile et de détention automatique.

En octobre, dans le cadre de son « paquet sécurité », le Parlement a mis en place de nouvelles mesures, notamment la suppression des allocations pour les personnes demandeuses d’asile dont la requête était traitée par un autre État membre de l’UE au titre du Règlement Dublin III. Ces personnes n’avaient droit qu’à deux semaines d’aide provisoire, à de rares exceptions près.

Le programme d’admission à titre humanitaire pour les Afghan·e·s, lancé en octobre 2022 et qui visait à accueillir 1 000 personnes par mois, a été arrêté prématurément par le gouvernement. Au 31 décembre 2024, seulement 1 093 ressortissant·e·s d’Afghanistan avaient été transférés en Allemagne. Quelque 2 000 Afghan·e·s admis au programme demeuraient bloqués en Afghanistan ou au Pakistan dans l’attente de leur transfert en Allemagne.

Le 9 décembre, l’autorité chargée d’examiner les demandes d’asile a suspendu les procédures en cours pour les Syrien·ne·s, plongeant près de 50 000 personnes dans une situation encore plus précaire. Cette suspension les obligeait à résider dans des centres d’accueil, leur interdisait de travailler, limitait leur accès aux services de santé et les empêchait de demander un regroupement familial.

DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE

Une enquête parlementaire et une série d’articles de journalistes d’investigation ont révélé que la police avait utilisé des technologies de reconnaissance faciale sans fondement juridique suffisant dans au moins six Länder.

DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS

En avril, une commission chargée par le gouvernement d’une expertise sur « la médecine reproductive et l’autodétermination en matière de procréation » a présenté des propositions pour dépénaliser et réglementer l’avortement. Le même mois, les conclusions préliminaires d’un projet de recherche de plusieurs années sur « l’expérience et la situation des personnes vivant une grossesse non désirée » ont mis en lumière la nécessité de rendre la réglementation conforme aux normes internationales relatives aux droits humains et aux lignes directrices de l’OMS sur les soins liés à l’avortement. En décembre, des membres du Parlement ont présenté une proposition de loi pour légaliser partiellement l’avortement mais, à la fin de l’année, la procédure était encore officiellement illégale.

En novembre, une loi visant à protéger les personnes enceintes du harcèlement aux abords des centres d’avortement et des centres de conseil psychosocial (que les personnes souhaitant avorter avaient l’obligation de consulter) est entrée en vigueur. Ce texte interdisait notamment d’entraver délibérément l’accès à ces établissements, d’exercer des pressions sur une personne enceinte et de lui présenter des documents inexacts ou dérangeants.

DROIT À UN ENVIRONNEMENT SAIN

Le 16 mai, le tribunal administratif supérieur de Berlin-Brandebourg a estimé que le gouvernement fédéral n’avait pas respecté la Loi fédérale sur la protection du climat, les mesures de protection du climat prévues dans différents secteurs étant jugées insuffisantes pour atteindre les objectifs juridiquement contraignants de réduction des émissions fixés par cette loi.

Le 17 juillet, une version modifiée de la loi, qui éliminait le fondement juridique de cette décision de justice, est entrée en vigueur. Les objectifs de réduction globale des émissions de gaz à effet de serre sont restés inchangés, mais la loi modifiée a supprimé le caractère contraignant des objectifs pour certains secteurs ainsi que l’obligation de présenter des mesures d’urgence si ces objectifs n’étaient pas atteints.

TRANSFERTS D'ARMES IRRESPONSABLES

En juin, des expert·e·s des Nations unies ont appelé les États à cesser les transferts d’équipements militaires à Israël pour éviter de se rendre responsables de violations des droits humains. Le nombre de licences accordées pour de tels transferts de l’Allemagne à Israël a diminué, mais certaines ont été maintenues. L’Allemagne a également autorisé des transferts d’armes et d’équipements militaires à destination de l’Arabie saoudite, malgré le non-respect par ce pays de l’obligation de rendre des comptes pour des violations graves du droit international relatif aux droits humains et du droit international humanitaire en lien avec le conflit au Yémen.

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